Rentrée « caliente » dans le football espagnol. Entre la rivalité Barça – Real qui dégénère lors de la finale de la super Coupe, l’éclatement complet des créneaux de diffusion des matchs de championnat et la rebellions des clubs modestes contre l’actuelle répartition des droits TV, la Liga s’offre une rentrée sous pression.
Parmi les dossier chaud de la rentrée en Liga espagnole, la volonté de la Ligue de football de faire payer, à l’instar des TV un droit de péage aux radios pour retransmettre les matchs en direct soulève une vague de protestation.
La situation est, quelque part, une conséquence indirecte de la crise économique qui affecte l’Espagne et ses clubs sportifs professionnels. Je présente la situation et la façon dont elle pourrait s’étendre ou non dans d’autres championnats.
Comment en est-on arrivé là.
Dans un contexte économique très difficile, les clubs espagnols cherchent, comme leurs homologues français, à maximiser les revenus tirés de leurs droits audiovisuels. Celle s’est traduit par l’achèvement du saucissonnage de la journée de championnat en 7 tranches horaires différentes. Parmi ces découpages, celui du dimanche midi a fait couler beaucoup d’encre. Ce créneau horaire est qualifié créneau horaire « des chinois » car il a pour but de renforcer la visibilité de la Liga en Asie.
Dans cette quête de recette, Mediapro, la société qui possède l’ensemble des droits du football espagnol, a décidé d’explorer un nouveau filon, la diffusion radiophonique payante. L’idée est de permettra uniquement aux radios qui auront payé un droit à retransmettre les matchs et à accéder à la zone « presse » des stades (tribune de presse + salle de conférence de presse). La somme demandée pour les 5 principales chaînes de radio espagnoles représente une somme avoisinant les 14 millions d’euros.
Cette demande a déclenché la fureur des radios concernées qui ont annoncé en bloc qu’elles refuseraient de payer.
Qui est dans son droit ?
Au delà de la dimension purement médiatique, c’est le cas de le dire, ce contentieux pose un intéressant problème juridique.
En effet, s’opposent en quelque sorte l’application d’un droit contractuel à l’interprétation d’un principe fondamental du droit, le droit à l’information.
Dans une logique juridique étroite, la société Mediapro est dans son droit. Le contrat qui la lie avec la ligue de football professionnel traite de l’ensemble des droits audiovisuels, dont les droits radiophoniques. Elle peut, à juste titre, demander une contribution aux radios qui veulent retransmettre en direct les matchs de Liga.
A contrario, les radio concernées estiment que l’accès libre des médias (radio et presse) aux enceintes sportives, n’est que l’application du principe fondamental de droit à l’information et les plus de 85 années de pratique à ce niveau en Espagne ne peuvent être balayés de la sorte. Par extension, si l’on fait payer les radios, pourquoi ne pas faire payer les journaux aux stades ? Ce qui quelque part ferait sortit le spectacle sportif du champ d’application du droit à l’information.
L’omnipotence du football.
L’autre élément qui est à mon sens sous jacent dans ce conflit est la dimension omnipotente du football en Espagne. En effet, comme on dit, en Espagne, le football, n’est plus un sport mais une religion et les dirigeants de celui-ci savent que les aficionados suivront toujours leur club quoi qu’il arrive.
Ainsi, ils peuvent se permettre de faire pression sur les médias pour leur demander de payer afin d’avoir le droit de parler de la discipline la plus populaire et de toute façon incontournable.
La situation est bien évidemment différente pour les autres disciplines qui cherchent au contraire à développer leur audience.
La résolution du contentieux.
Aujourd’hui tout club de football de Liga qui contreviendrait aux accords avec Mediapro s’expose à une amende de 2 millions d’euros par match. Le contrat est donc appliqué et les radio espagnoles ne sont plus en situation de retransmettre les matchs comme elles le faisaient.
Chacun étant dans son bon droit, et le front des radios étant solidaire, la résolution du conflit sera selon toute vraisemblance judiciaire. Les différents protagonistes semblent être arrivés à une situation de quasi non retour en terme de dialogue après que Jaume Roures, le principal actionnaire de cette société se soit fait très vivement critiquer par les journalistes du « partido de la 12 » l’une des émissions de radio sur le sport phares en Espagne.
Si la justice donne raison média pro les radios n’auront pas d’autres choix que de payer, le football constituant l’un des produits phares de leur grille.
Si tel est le cas, il n’est pas impossible que cette situation ne donne pas des idées aux autres ligues professionnelles européennes, elles aussi à la recherches de nouvelles ressources dans un contexte économiquement morose.
Yannick, le Docteur ès sport.